Les différents degrés de conscience dans le monde du vivant, de l’être unicellulaire au Cosmique..
Posted on November 19, 2010 by LoicCorolaire : Un système artificiel pourrait-il lui aussi enrichir l’univers en information et en conscience?
Pour se situer soi-même dans la chaine de l’évolution, telle qu’elle se déploie dans le temps et dans l’espace, il est intéressant d’essayer de distinguer les niveaux de conscience qui peuvent se déployer dans le monde du vivant, selon le niveau de complexité des organismes qui en sont le support.
En me basant sur certaines expériences personnelles internes, je créerai un pont vers l’étape qui suit le monde vivant formel, où justement la dimension de conscience devient majoritaire par rapport à la prégnance du monde physico-matériel.
Est vivant ce qui est capable de se reproduire, autrement dit, est vivant ce qui est issu d’un organisme vivant semblable à lui et qui peut en produire un autre…. Le vivant est engendré, et il engendre.
La conscience, elle, se définit souvent par la faculté de se connaître soi-même, et donc de définir un soi intérieur par rapport à un extérieur environnant.
En termes de sciences physiques, on peut définir le couple (vivant, conscience) comme étant un système capable de générer de la néguentropie, c’est à dire capable d’apporter un gain d’information dans l’univers, au prix d’une dégradation de l’énergie physique. Ces phénomènes sont décrits en partie dans le cadre de la Thermodynamique. C’est pourquoi, un système (vivant, conscience) qui a un très grande efficacité dans la conversion de l’énergie- ”masse” en énergie-”information” est un système qui évoluera vers un continuum disposant d’une plus grande densité d’information intrinsèque, et donc accèdera à un continuum de plus grande conscience, en acquérant par là-même de l’expérience interne.
Réfléchir aux différents degrés de conscience existants dans l’univers du vivant permet aussi de préciser si il serait possible d’élaborer un support artificiel suffisamment complexe pour héberger une conscience, autrement dit, capable de contribuer lui aussi à cette transformation de l’énergie en information, et finalement en conscience.
Dans notre étude du monde du vivant, nous voyons que l’être unicellulaire dispose d’une forme primaire de conscience, puisque cet unicellulaire est un organisme capable de réagir à un stimuli, si ce stimuli dépasse un certain seuil d’intensité. Dans sa structure, cet organisme à donc mémorisé des seuils, seuils qui déterminent un comportement spécifique. Ces seuils seront très faiblement modifiables selon l’expérience acquise. Ce type de conscience correspond à la capacité de mémoriser des valeurs de seuils de réaction. C’est le premier niveau de conscience, essentiellement réactif, que nous définirons ici.
Le deuxième niveau de conscience est celui que l’on peut attribuer, dans le monde du vivant, à l’insecte. L’insecte est capable de mémoriser non seulement des valeurs d’intensité, mais est en mesure de mémoriser des suites d’actions, dans des situations s’étant réellement produites. On pourrait dire que l’insecte mémorise et adapte des algorithmes qui déterminent déjà des choix et des décisions dans un environnement, en vue d’accomplir un but. L’abeille par exemple (ici en tant qu’individu isolé), mémorise une cartographie des fleurs en fonction de la position du soleil et du rythme circadien. Ici aussi, le type de conscience est réactif, « mais avec discernement structurel » [Cardon,1999].
Ces deux premiers niveaux de conscience sont majoritairement associés à un « inné » assez statiquement défini dans le code génétique des organismes vivants en question, et la technologie est en mesure d’implémenter de tels systèmes équivalents dans ce que l’on dénomme des « Automates à états ». Le quota d’apport d’information dans l’univers par synthèse d’expérience est très faible en ce qui concerne ces deux premières strates du monde vivant organisé.
La situation se précise davantage en ce qui concerne le troisième niveau de conscience, que l’on peut associer aux mammifères en général. Ici commence à se définir beaucoup plus l’existence d’un monde intérieur, disposant déjà d’une certaine autonomie vis à vis d’un environnement extérieur. Cela se met en place par la capacité qu’ont déjà les animaux de se construire en eux-mêmes une représentation interne, c’est à dire abstraite, de l’environnement. Dans ce niveau s’opère réellement une mise à distance entre le système de conscience et le milieu dans lequel ce système évolue, par la création d’entités idéelles élaborées par ce niveau de conscience en fonctionnement dans le milieu. La conscience des mammifères n’est plus définie « par construction » dans le code génétique de l’organisme, mais beaucoup plus acquise lors du parcours existentiel de ces créatures. Le code génétique lui, a surtout servi à organiser la matière-substance pour élaborer un support organique à la mémorisation de ces représentations abstraites. La conscience de ces organismes vivants devient à ce stade le berceau d’un psychisme plus puissant, reflet des capacités de ressenti, d’affectivité, de plaisir, de désir, de peur, etc. qui peuvent être vécus. Les comportements des mammifères sont beaucoup moins déterministes et leur conscience beaucoup plus adaptative, prélude à une organisation sociale possible.
Le quatrième niveau de conscience, héritant des caractéristiques des niveaux précédents et antérieurs en termes d’évolution, voit ici s’opérer un réel saut qualitatif. Une étape fondamentale est ici franchie : les organismes vivants de ce niveau ont, par une capacité d’abstraction amplifiée, accédés à la faculté de questionnement sur eux-mêmes et sur leur environnement. Cette situation détermine une mise à distance définitive entre la représentation abstraite interne qu’à cet organisme vivant de l’environnement et l’environnement lui-même. Un réel processus cognitif apparaît, de par la manipulation interne des représentations abstraites de manière à les développer, les complexifier et éventuellement d’en déduire une action nouvelle sur le milieu environnant. On a dit que la conscience existe entre l’espace existant entre un stimuli et la réaction éventuelle qui en découle. Cette appréciation est ici particulièrement mise en valeur. Ce détachement par rapport au contexte immédiat induit aussi une nécessité particulièrement forte de constituer une structure sociale et donc de développer le langage et autres moyens de communication nécessaires. C’est le niveau de conscience de l’humain. L’être humain a, alors, par cette capacité d’intérioriser sous forme de représentations abstraites les évènements concrets ou imaginaires, la possibilité de synthétiser ses expériences pour enrichir le substrat informatif de l’univers, et par là-même, d’accéder par élaborations successives aux continuums de conscience suivants, où siègent les niveaux de conscience « supérieurs ».
Dans ce « cinquième » niveau de conscience, c’est la conscience elle-même qui se détache et devient autonome vis à vis du substrat physique, et devient aussi de plus en plus précisée. Elle est alors, par là-même, totalement responsable d’elle même et de ses implications sur le reste de l’univers. Dans toutes les étapes que nous avons franchi, nous pouvons apprécier qu’à chaque fois que la capacité d’abstraction augmente, plus la notion de limite est précise entre le monde intérieur et le monde extérieur, plus la conscience est élaborée, mature, responsable. Par la plus grande maitrise du sens de la limite qui est associée à chaque degré d’évolution, le rapport de l’énergie-information-conscience sur la matière-base s’augmente, pour élaborer une conscience capable de fonctionner en coordination avec les autres consciences en présence, afin d’intégrer sans discontinuité, après de multiples étapes, la trame de conscience permanente Intra-Universelle, et cela sous sa surveillance.
Note : certaines notions techniques concernant les quatres premiers niveaux de conscience sont issus d’un livre que je recommande : « Conscience Artificielle et Systèmes Adaptatifs » de Alain Cardon, aux editions Eyrolles, 1999.
This entry was posted in Artificial Consciousness and Arificial Intelligence. Bookmark the permalink. Edit
← Faisons évoluer notre anthropocentrisme nombrilique fondamental… 23 milliards de “Terres” possibles dans notre galaxie…
Gravité, Temps, Conscience… Science Unitaire →
3 Responses to Les différents degrés de conscience dans le monde du vivant, de l’être unicellulaire au Cosmique..jean-basile says:
December 29, 2010 at 1:20 am (Edit)Bonjour!
Tout d’abord, merci pour ce texte que je trouve très intéressant, en particulier la notion de transformation de masse en énergie et en information. Je ne connais rien à la thermodynamique donc je m’arrête à rêver à ce que tu dis ici, mais c’est déjà intéressant pour moi.
Cependant, si je pense arriver à te suivre lors des 4 premiers “stades” de la conscience, j’ai du mal à cerner le cinquième. Tu dis que dans ce cinquième “stade” (même si ça ne me semble pas le mot adéquat, d’ailleurs tu utilises plutôt le mot “niveau”), “c’est la conscience elle-même qui se détache et devient autonome vis-à-vis du substrat physique”. Ce que je comprends, c’est que les “questions-réponses” de la conscience, se font sans avoir besoin de stimuli physique. Prenons un exemple : un organisme a faim. Au 3° niveau de conscience, cet organisme va pouvoir apprendre, mémoriser des schémas de comportements pour pouvoir arriver à satisfaire sa faim. Un organisme du 4° niveau de conscience va pouvoir se représenter cette faim, pour pouvoir entre autre la verbaliser pour demander de l’aide, se questionner sur ce qu’il peut faire pour la satisfaire…
Mais dans les deux cas, cette apparition d’un mouvement de conscience se fait de par un stimuli physique, comme la faim par exemple. C’est ce qui pousse à développer ce moment de conscience. Mais si je te suis bien, ce que tu dis à propos du 5° niveau de conscience est que la conscience se passe alors de ces stimulis physiques, on pourrait dire que les questions, les problèmes posés ne viennent pas du monde physique mais de la conscience elle-même.
On serait alors dans des questions d’éthique, il me semble, et d’ailleurs tu introduit ici la notion de responsabilité et de maturité. J’ai du mal à formuler ce que je veux dire, mais globalement cela me gène de dire que la notion de responsabilité serait associée à des éléments de mentalisation. Ce que je veux dire, c’est que je me demande du philosophe ou de l’éducateur est le plus responsable : le premier aura tendance à répondre par questionnements, à déployer le problème sous toutes ses formes, dans une mentalisation intense, qui résulte de questionnements perpétuels imposés par sa consicence. Le deuxième, serait plus dans l’action, par rapport à des schémas qu’il a appris, mais aussi à ses émotions, qui lui permettent de savoir lequel de ses schémas appliquer, quelle réponse apporter.
Je me rends compte que c’est vraiment flou ce que je veux dire, mais globalement c’est que j’ai l’impression que dans le fait de caractériser le cinquième niveau par un état “autonome du substrat physique”, on s’éloigne du corps et donc de l’émotion, de la spontanéité et de la créativité, qui serait d’ailleurs peut-être un mélange de ce niveau de conscience que tu décris et de la nécessité de garder une prise au corps, à l’émotion.
Enfin bon, tout cela est très mentalisé 😉 héhé.Moralité : vive le jazz! je vais chercher jacques loussier d’ailleurs, j’espère le trouver!
Reply
Loic says:
January 4, 2011 at 12:39 pm (Edit)Bonjour Jean-Basile, et merci pour ton commentaire!
Je vais essayer de préciser ce que je voulais décrire dans ce post. Il y a effectivement un saut à faire entre le 4eme et 5eme niveau, à l’image d’un saut « quantique ». Les 4 premiers niveaux correspondent davantage à une analyse comportementale issue du cadre de la recherche en « Conscience Artificielle », un domaine de recherche qui se focalise sur la manière de créer un système informatique disposant d’un tel niveau de complexité qu’il serait à même de générer « des faits de conscience », selon l’expression de A.Cardon. Dans cette démarche, et selon une approche structurante, on décortique beaucoup les éléments capables de définir un être « pensant » afin de voir si on peut transposer ces facultés pensantes, avec tout ce que cela comporte, dans ce qu’on appelle le « domaine du calculable », puisque, in fine, cela doit tourner sur un support, par exemple, silicium, en tout cas, de matière inerte au départ. Mais ce qui apparaît à nos yeux « matérialistes » comme une recherche technologique a cependant des implications sur d’autres dimensions de conscience et d’énergie, car même, si scientifiquement parlant, on essaye de décrire l’univers en termes d’équations mathématiques et de concepts philosophiques, ça ne l’empêche pas d’être beaucoup plus par nature, puisque l’Univers est à la fois matériel-structural, psychique-énergétique et spirituel-conscient. Comme la science officielle, qui a seule droit d’expression dans les universités, se réfugie à décrire l’univers exclusivement du point de vue matérialiste en évitant tout ce qui à trait au domaine du supra-sensible et du spirituel, elle génère des concepts partiels qui conduisent la civilisation à des démesures de puissance considérables et potentiellement très destructeurs. Tu essayes toi-même de revenir à quelque chose de plus équilibré en contrebalançant l’approche mentale du philosophe, plus abstraite et conceptuelle, avec celle de l’éducateur, qui lui a une expérience plus réelle, concrète et expériencielle. C’est justement ce que je veux signifier en décrivant ce que j’appelle ici transitoirement le 5eme niveau (juste par rapport aux 4 précédents) qui est celui où s’enregistre l’essence expérientielle que nous acquérons au contact des gestions des mondes de l’énergie et de la forme, comme peut être l’expérience de gestionnaire de l’énergie qu’acquiert l’éducateur au contact de cas difficiles. Un très bon éducateur, pour reprendre ton exemple, connait les lois qui on été décrites par le philosophe, mais les précise au contact de l’expérience de gestion concrête qu’il fait et amplifie sa science intérieure personnelle, sa maîtrise interne de l’énergie, à tel point qu’il sait que tel type d’émission de sa part déclenche ou corrige et canalise tel type d’énergie en présence, etc. Il sait aussi dans quelles limites il a, ou n’a pas, un contrôle des situations. Au fur et à mesure de son parcours, sa conscience interne, formée tout au long de sa vie, a acquis une telle maitrise, et s’est enrichie. Pour acquérir cette conscience particulière, il a eu besoin d’avoir une enveloppe corporelle – son corps physique – que l’Univers lui a fourni pour pallier son manque de maîtrise interne. Ayant intelligemment et sagement utilisé son corps physique pour enrichir sa conscience, il a acquis par lui même le sens de la maîtrise des limites, à tel point que son identité, son être sait se tenir et se contenir dans l’Univers sans avoir la nécessité d’une matrice corporelle physique. C’est cela que j’essaye d’exprimer en parlant d’un niveau où la conscience est indépendante du substrat physique, et plus autonome. Dans ce niveau de la Création, l’être à acquis une Science interne des choses, qui correspond plus à une compréhension instantanée plutôt qu’à une connaissance externe et mentale. Cela ne l’empêche pas de vivre d’intenses émotions, mais ces émotions ont une qualité plus subtile, plus de la nature de l’émerveillement permanent sur la perfection des rapports harmonieux entre Créateur, Créatures, et Création…
Nous avons tous à faire fonctionner notre partie « éducateur », ou mieux « Instructeur »en faisant évoluer les autres, car c’est comme cela que nous évoluons nous-mêmes. C’est pour cela que les Initiés ont dit, dans la Tradition, qu’il faut « travailler pendant qu’il est jour… » – pendant que l’on dispose d’un corps physique – « …car nul ne peut travailler pendant la nuit » – si on n’a pas profité de son incarnation pour acquérir une maitrise de gestion dans les continuums suivants à l’incarnation – Il y a une très grande logique interdimensionnelle dans l’Univers!.
Reply
mikael says:
January 29, 2011 at 10:23 pm (Edit)Merci à Loîc de nous proposer un sujet de réflexion aussi vaste et intéressant qui interpelle chacun de nous, puisque nous sommes ce que nous avons conscience d’être. Et qu’est-ce que je veux dire quand j’affirme : “j’ai conscience de…”?
Descartes appelait “pensée “, au sens de “conscience immédiate”, tout ce qui est tellement en nous que nous l’apercevons immédiatement par nous-mêmes et en avons une connaissance intérieure ; “ainsi toutes les opérations de la volonté, de l’entendement, de l’imagination et des sens sont des pensées”.
Plus près de nous, Bergson traite, dans un ouvrage, des ” données immédiates de la conscience”, c’est là le point de départ de toute philosophie.
” Ce que nous percevons en fait, c’est une certaine épaisseur de durée qui se compose de deux parties : notre passé immédiat et notre avenir imminent. Sur ce passé, nous sommes appuyés ; sur cet avenir nous sommes penchés ; s’appuyer et se pencher ainsi est le propre d’un être conscient. Disons donc, si vous voulez, que la conscience est un trait d’union entre ce qui a été et ce qui sera, un pont jeté entre le passé et l’avenir” – écrit-il dans “L”énergie spirituelle”, tandis que Balwin affirme : ” La conscience est la racine de toute connaissance “.
Cependant, la conscience par elle-même n’a pas de contenu, elle est seulement intentionnelle – intentionnalité, propriété de l’acte d’être conscient, car toute conscience est conscience de quelque chose et dans le même moment conscience de soi.
C’est pourquoi notre conscience fait de nous des êtres responsables, responsables des actes qui nous font agir en conscience. On parle d’ailleurs, dans certains cas, d’un acte exercé inconsciemment et l’on calcule alors le degré de conscience de la personne pour infirmer ou confirmer sa responsabilité.
Mais la dimension morale de mon existence est aussi un acte. Socrate expliquait aux Athéniens, après sa condamnation, qu’il n’avait pas voulu céder à la tentation de faire taire lâchement sa conscience morale ; la voix de sa conscience lui disait de refuser d’être impudent.
C’est en cela que la conscience est un gage du bien commun, lorsque la force morale régit les actes des hommes et, par voie de conséquence, des sociétés, des états, des nations. On voit où peut mener le déni de conscience morale, lorsqu’ un dictateur impose son autorité immorale à tout un peuple et que ce peuple accepte ou subit cette domination. Ainsi Simone Weil ( la philosophe ) écrit-elle à ce propos :
“Nous avons la responsabilité totale du degré de clarté de nos propres pensées ; nous ne faisons pas toujours l’effort nécessaire pour devenir pleinement conscients, mais nous avons toujours le pouvoir de le devenir. Toutes les observations qui tendent à établir des degrés de conscience peuvent être admises mais, quand ils ne l’expliquent pas par des états physiologiques, ils s’expliquent par une non-activité de la pensée volontaire”.Mikaël depuis la côte d’ivoire